Des recherches indiquent que la victimisation des enseignants est un phénomène répandu et ayant des conséquences sur leur bien-être (Curran et al, 2019; Longobardi et al, 2019; Moon et McCluskey, 2018). Cependant, peu d’études traitent de la relation entre la victimisation des enseignants et le taux de roulement de ces derniers (Moon et al., 2020). L’objectif de cette recherche est d’examiner la relation entre sept différents types de victimisation – vol/vandalisme, agression physique, harcèlement sexuel, violence verbale, agression par contact non physique, intimidation en personne et cyberintimidation – et le taux de roulement des enseignants. De plus, elle vise à déterminer si l'expérience de la victimisation et la perception qu'ont les enseignants des réponses de l'école à la situation ont été des facteurs critiques, selon eux, dans leur décision de quitter la profession enseignante.

Les données ont été recueillies en trois phases, auprès d’enseignants d’écoles secondaires du Texas, notamment au moyen d’un système d’enquête en ligne (Qualtrics). Lors de la première phase, un plan d'échantillonnage en grappes, stratifié à plusieurs degrés a été utilisé pour sélectionner un échantillon représentatif de la population cible, soit 1628 individus  (pour les phases II et III ce sont respectivement 1317 et 1101 répondants).

Un modèle de régression logistique multinomial a été utilisé afin de mesurer les liens entre la victimisation et le taux de roulement des enseignants. Les résultats obtenus indiquent que le fait de subir de la violence est un prédicteur important du roulement des enseignants. On constate plus précisément que : (1) à l’exception du harcèlement sexuel, les différents types de victimisation mesurés sont des facteurs prédictifs significatifs du changement d’école ou du décrochage enseignant; (2) l’agression physique, de même que la violence verbale et l'agression par contact non physique (les deux formes de victimisation des enseignants les plus répandues) sont significativement liées au roulement des enseignants; (3) les enseignants victimes de vol ou de vandalisme sont beaucoup plus susceptibles de quitter la profession, tandis que ceux victimes d'agression physique ou de harcèlement sont plus susceptibles de changer d'école; (4) la prévalence ou la fréquence de multivictimisation des enseignants est liée de manière significative et positive à la mobilité de ces derniers et (5) près (?) de la moitié des enseignants qui ont quitté la profession a déclaré que le fait d’avoir été victimisé par les élèves ou leurs parents/tuteurs a joué un rôle dans leur décision de décrocher. Les auteurs suggèrent que les décideurs et les directions d’école prêtent une attention particulière à l’ampleur et à la gravité de l’agression des élèves à l’égard des enseignants et à ses répercussions néfastes sur la carrière de ceux-ci.